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Marie Etienne Comment s'est fait ce livre

Comment s'est fait ce livre
par Marie Etienne


Hêtraies
bombes à fragmentations
boules de suif
arbres en boule
elles sont ce que l'on veut
dissimulées mais non opaques
donnant à voir
leur marmite de sorcière. 

A mon tour, j'ai exacerbé la forme dans ce sens, concentrée et explosive, des dessins à la mine de plomb. Ce travail s’est concrétisé par un livre à la demande de Philippe Coquelet, aux éditions Rencontres. Le texte est manuscrit, avec titre, faux-titre et colophon en typo composée à la main. Les pages de garde sont un tirage numérique d'un dessin.

Lorsque Michel Mousseau m’a invitée chez lui pour le projet d’un livre, je dois dire tout d’abord que j’ai aimé l’endroit, qui était, autrefois, une menuiserie. Un lieu renseigne sur qui l’occupe ; sur les prémisses d’une œuvre quand l’habitant est un artiste. Dans celui de Michel, sitôt entrée je me suis sentie bien, parce qu’accueillie, mais pas seulement. Y règnent à la fois la liberté, la réflexion, l’attachement pour les objets et leur agencement. Les tables tantôt vastes et tantôt délicates sont occupées par des crayons en nombre impressionnant, alignés, bien taillés, de grandes feuilles de beaux papiers ; le canapé est rouge, sa forme est alanguie, il tend ses bras aux visiteurs car situé près de la porte. L’atelier est un lieu de travail, il ne cherche pas à être beau, il l’est, spontanément. Le jour de ma visite, les éditeurs, Bernadette et Philippe Coquelet, étaient déjà présents, ils discutaient papier, nombre de pages et emboîtage. Michel alors a commencé à me montrer de grands dessins que je n’avais d’abord pas vus, exposés dans des cadres et posés sur le sol, puis il en a déployé d’autres, qui se trouvaient dans des cartons, il les sortait, il racontait : comment ils étaient nés, de quelles promenades et dans quelle région. Sans même y réfléchir je me trouvai à ses côtés dans la forêt parmi les arbres ou la clairière qu’il arpentait. Il y avait de la lumière, celle qui traverse les frondaisons, de grandes taches sombres, de l’inquiétude et de la paix, une jubilation et un acharnement. Le soir même en rentrant j’écrivis quelques pages qui ressemblaient à un poème.

MICHEL MOUSSEAU

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